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LES PETITS POLARS
DU MONDE N 5
UNE NOUVELLE INEDITE
DE MARIN LEDUN
ILLUSTREEPAR
CHARLES BERBERIAN
EN FRANCE METROPOLITAINE
FASCISME FRANQAIS, L'EXTREME DROITE A-T-ELLE
LA POLEMIQUE CONTINUE GAGNE LA BATAILLE DES IDEES ?
LE NOUVEAU BEN LADEN
EST IRAKIEN
LE MONDE DES LIVRES - LIRE PAGE 2
DEBATS- LIRE PAGES 16-17
; 18-19
Vendredi 30 mai 2014 - 70 e annee - N°2i574 - 2€ - France metropolitaine - www.lemonde.fr
Fondateur : Hubert Beuve-Mery
Entreprises,
pouvoir d'achat
Le gouvernement
donne des gages
tous azimuts
0 Depuis la deroute des europeennes,
le gouvernement lance de multiples ballons d'essai
0 II exclut de revenir sur les baisses d'impots,
en depit de la derive des deficits, et envisage
la baisse des cotisations des fonctionnaires
« La « suspension » des seuils sociaux,
vieille revendication des entreprises, est a l'etude
0 Les emplois a domicile pourraient
etre davantage aides lire page6
A RODEZ, UN MUSEE
POUR SOULAGES
a Le peintre ne voulait pas
d'un mausolee. Sa ville natale
lui consacre un lieu d'exception
LIRE PAGE 8
Pierre Soulages,
devant Tune
de ses oeuvres,
a Rodez, en mai 2014.
PASCAL PA VAN l/AFP PHOTO
Le professeur Obama et ses ambivalences distinguees
L 'elegant intellectuel qui siege a la Mai-
son Blanche a voulu, mercredi 28 mai,
repondre aux detracteurs de sa politi-
que etrangere. En gros, ceux-la repro-
chent a Barack Obama d'etre, sur la scene
internationale, moins un acteur qu'un com-
mentateur- tres bon, d'ailleurs...
Le president avait choisi la prestigieuse
academie militaire de West Point, dans l'Etat
de New York, pour redonner sa vision du role
des Etats-Unis dans le monde. II est attaque a
EDITORIAL
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CD
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la fois par une partie de la gauche democrate
et par les republicains d'obedience neocon-
servatrice.
Les uns et les autres lui reprochent de ne
pas etre assez interventionniste. lis denon-
cent sa passivite, sa reticence a user de la for-
ce, brer un attentisme dont profiteraient
Chinois et Russes pour s'imposer aux depens
de l'Amerique. Cedant trop facilement a l'hu-
meur isolationniste du pays, M. Obama presi-
derait ainsi au declin des Etats-Unis sur la sce-
ne internationale. A sa maniere, c'est-a-dire
avec dignite.
C'est vrai, il y a du professeur chez M. Oba-
ma, et c'est une bonne chose. II tire les lecons
des experiences passees. Celles d'une guerre
d'Irak qui a provoque une onde de choc dont le
Proche-Orient paie encore le prix. Celles d'une
guerre d' Afghanistan ni gagnee ni perdue. Voi-
re les lecons d'une intervention en Libye aux
consequences pour le moins ambigues.
II a mesure les limites de ce que peut
accomplir Taction militaire. Devant les
futurs officiers de l'armee americaine, il a
observe : « Depuis la seconde guerre mondia-
le, certaines de nos erreurs les plus couteuses
sont venues non pas de notre retenue, mais
de notre precipitation a nous lancer dans des
aventures militaires sans penser aux conse-
quences. »
Philosophe, il constate qu'il y a des proble-
mes sans solution - ou dont l'Amerique, en
tout cas, n'a pas la solution. «Les temps, Us
sont au changement » , comme chantait Bob
Dylan : les Etats-Unis de ce debut de XXFsie-
cle ne sont plus l'hyperpuissance qu'ils ont
pu etre. M. Obama est le premier president
americain d'une ere multipolaire, ou les puis-
sances emergentes veulent toute leur place.
Tout cela fait de lui un realiste, ce qui, la
encore, est plutot positif . Pour autant, repre-
nant une formule de l'ancienne secretaire
d'Etat, Madeleine Albright, M. Obama esti-
me que les Etats-Unis restent «la nation
indispensable » au maintien des grands equi-
libres strategiques.
Ceux-ci sont-ils menaces par le neo-inter-
ventionnisme de Moscou dans son voisinage
et par l'activisme agressif de la Chine dans le
Pacifique ? La question en appelle une secon-
de: la maniere Obama, tout en retenue,
notamment dans l'affaire syrienne, inci-
te-t-elle le Kremlin et la direction chinoise a
multiplier les faits accomplis sur le terrain ?
Cette meme maniere, tout en distanciation,
lui imposait-elle d'abandonner sans meme
une bataille politique, a Washington et a Jeru-
salem, le dossier israelo-palestinien ?
M. Obama donne l'impression de fuir les
difficultes plus qu'il ne les affronte. Cette per-
ception est peut-etre injuste. Mais, en diplo-
matic, le style compte - autant que les actes. ■
LIRE NOS INFORMATIONS PAGE 2
UN TIERS DE L'HUMANITE
EN SURPOIDS
a 2,1 milliards d'humains
souffrent de surcharge
ponderale. Cette « pandemie
galopante », selon une etude
publiee dans « The Lancet »,
s'aggrave depuis trente ans
LIRE PAGE 5
AUJOURD'HUI
L'Etat
au secours
de Caddie
Bpifranceva
renflouer en urgen-
ce le fabricant de
chariots (3 000 sala-
ries), poureviter
son depot de bilan.
CAHIER ECO - PAGE4
Apple s'of f re
des casques
audio
La marque a la pom-
me achete Beats
Electronics, specia-
liste de l'ecoute
en ligne et fabricant
de casques audio.
CAHIER ECO - PAGE 5
Comment
reglementer
I'e-cigarette?
Moyende sevrage
ouported'entree
dans le tabagisme ?
La cigarette electroni-
que est un casse-tete
pour les autorites.
FRANCE- PAGE 6
LE REGARD DE PLANTU
GUAM!) J£ FA\Sm$ fOoT, .
(T\jl. rw'elonwfi&!
Algerie 180 DA, Allemagne 2,40 €, Andorre 2,20 €, Autriche 2,50 €, Belgique 2 €, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Cote d'lvoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 €, Finlande 3,80 €, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grece 2,40 €, Guadeloupe-Martinique 2,20 €, Guyane 2,50 €, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 €,
Italie 2,40 €, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 €, Malte 2,50 €, Maroc 12 DH, Norvege 28 KRN, Pays-Bas 2,40 €, Portugal cont. 2,30 €, La Reunion 2,20 €, Senegal 1 800 F CFA, Slovenie 2,50 €, Saint-Martin 2,50 €, Suede 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Af rique CFA autres 1 800 F CFA
2
INTERNATIONAL
Xe31lon3e
Vendredi 30 mai 2014
M. Obama defend un interventionnisme mesure
Le president americain a defini, dans un discours a West Point, les grands principes de sa politique etrangere
Washington
Correspondante
S'il n'y avait qu'une phrase a
retenir de l'ambitieux dis-
cours de politique etrangere
pro nonce par Barack Obama, mer-
credi 28 mai, devant les cadets de
l'ecole militaire de West Point, ce
serait cet aphorisme du clou et du
marteau: «Ce n'est pas parce
qu'on a le meilleur marteau qu'on
doit voir chaque probleme comme
un clou. » Une variante de la «loi
de l'instrument» popularisee par
le psychologue Abraham Maslow,
et un raccourci saisissant de la phi-
losophic d'un president qui consi-
dere que Taction est parfois pire
que l'inaction.
Qu'on se rassure, a lance Barack
Obama, l'Amerique conserve le
« meilleur marteau ». Ceux qui par-
lent de declin le font pour des rai-
sons electoralistes. Elle a l'econo-
mie, l'energie et la population qui
lui permettent de rester la premie-
re puissance du monde. Quand un
typhon frappe les Philippines ou
que des ecolieres sont kidnappees
au Nigeria, c'est «vers l'Amerique
que le monde se tourne pour cher-
cher secours». Les Etats-Unis res-
tent « la nation indispensable ».
Mais le monde a change. La tech-
nologic et la mondialisation ont
diffuse le pouvoir dans les mains
des individus, y compris extremis-
tes ; la multiplication des reseaux
d'information fait qu'il n'est plus
possible d'ignorer « les conflits, les
Etats enfaillite et les revokes popu-
lates qui auraient ete a peine
remarques ily a une generation ».
La tentation est grande, chez les
interventio nnistes « de droite et de
gauche », de vouloir resoudre tou-
tes les crises. Les realistes veulent
n'intervenir que la ou l'interet
national est en danger. Ni les uns
niles autres « ne respondent pleine-
ment aux besoins du moment »,
estime-t-il en tentant de definir
une troisieme voie.
L'isolationnisme n'est « pas une
option » pour l'Amerique, encore
moins au XXP siecle. Mais c'est aus-
si une erreur de penser que les pro-
blemes ont tous des solutions mili-
taires. Barack Obama se dit encore
«hante» par sa decision de 2009
d'envoyer des renforts en Afghanis-
tan. Cette annee-la, il avait aussi ete
Barack Obama, a l'academie militaire de West Point (Etat de New York), mardi 27 mai. mike groll/ap
invite a la ceremonie de fin d'annee
a West Point. Quatre des diplomes
ont peri en Afghanistan. D'autres
ont ete blesses et leurs blessures le
«hantent» aussi. S'il continue de
penser que sa decision de ne pas se
meler d'une guerre civile en Syrie
etait « la bonne decision », il n'avan-
ce aucune certitude comparable
sur 1' Afghanistan.
Ne voyons pas tous les proble-
mes comme des clous, invite
M. Obama. «Depuis la seconde
guerre mondiale, certaines de nos
erreurs les plus couteuses sont
venues non pas de notre retenue
mais de notre precipitation a nous
lancer dans des aventures militai-
res, sans penser aux consequences. »
L'action militaire « ne peut pas etre
la seule, ou meme la principale, com-
posante de notre leadership ».
L'action militaire « ne
peut pas etre la seule,
ou meme la principale
composante de notre
leadership »
Barack Obama
Le president definit les condi-
tions d'une intervention. Lorsque
l'interet national est menace, les
Etats-Unis ne doivent pas hesiter a
frapper l'adversaire, unilaterale-
ment si necessaire, dit-il, quoique
avec le souci d'une certaine propor-
tionnalite: «Vopinion internatio-
nal a du poids. »
Lorsque les interets nationaux
ne sont pas en jeu, meme si la crise
qui survient « remue notre
conscience », alors, «le seuil pour
une action militaire doit etre plus
eleve». S'il y a intervention, elle ne
saurait etre que multilaterale.
Pour combattre les terroristes,
plutot que d'envahir les nations
qui les abritent (en vertu d'une doc-
trine, celle de son predecesseur,
qu'il juge « naive et intenable»),
M. Obama propose une formule de
sous-traitance : un partenariat
avec les pays confronted a la mena-
ce islamiste. La Maison Blanche va
demander au Congres de financer
un fonds de partenariats antiterro-
ristes (Counter-Terrorism Par-
tnerships Fund) de 5 milliards de
dollars (3,7 milliards d'euros). La
mission ira de l'entrainement des
forces de securite au Yemen a
l'equipement d'une force multina-
tionale de maintien de la paix en
Somalie, ou encore « la facilitation
des operations francaises auMali ».
Dernier volet du leadership ame-
ricain : precher parl'exemple. Com-
ment demander aux pays pol-
lueurs de faire des efforts quand
«tant de nos responsables politi-
ques nient» la realite du change-
ment climatique ? Comment
demander a la Chine de resoudre
ses differends maritimes sous le
regime de la convention sur le droit
de la mer quand le Senat americain
refuse de la ratifier? Les Ameri-
cains sont «exceptionnels», tance
M. Obama, non pas par « leur capa-
city a faire fi des normes internatio-
nales », mais a les mettre en valeur
par leurs actes : « C'est pourquoije
continuerai a pousser pourfermer
Guantanamo. » En effet, insiste le
professeur de droit qui dirige le
pays depuis plus de cinq ans, « les
valeurs de l'Amerique et ses tradi-
tions juridiques n'autorisent pas la
detention indefinie d'individus
au-deladenosfrontieres». m
CORINE LESNES
Francois Hollande esquisse une mediation
entre Vladimir Poutine et Petro Porochenko
UN SIGNE DE DETENTE ? Le nou-
veau president ukrainien, Petro
Porochenko, devrait croiser pour
la premiere fois depuis son elec-
tion, dimanche 25 mai, son homo-
logue russe, Vladimir Poutine,
lors des commemorations du
Debarquement en Normandie, le
vendredi 6 juin, auxquelles assis-
teront seize autres chefs d'Etat et
de gouvernement.
La presence exceptionnelle en
France de la plupart des diri-
geants occidentaux a cette occa-
sion va, de facto, transformer ces
ceremonies en sommet informel
sur l'Ukraine. D'autant que la
veille, le jeudi 5 juin, Francois Hol-
lande a prevu de s'entretenir suc-
cessivement a Paris avec Barack
Obama et Vladimir Poutine.
L'Elysee a confirme, mercredi
28 mai, la tenue de cette reunion
« informelle » avec le dirigeant.
Elle marquerait la fin de l'isole-
ment diplomatique du chef du
Kremlin, qui n'a ete recu par
aucun dirigeant occidental
depuis l'annexion de la peninsule
ukrainienne de Crimee par la Rus-
sie en mars.
Dans la foulee, l'Elysee a egale-
ment annonce, mercredi, la venue
de M. Porochenko. Une facon
d'adouber le president ukrainien
devant la communaute internatio-
nale, alors que M. Poutine, qu'il
cotoiera sur les plages normandes,
n'a toujours pas pris acte de son
election. Le Kremlin, assure-t-on a
l'Elysee, a ete informe de 1' invita-
tion adressee a M. Porochenko.
La portee symbolique du geste
est claire : esquisser un premier
rapprochement entre la Russie et
l'Ukraine, alors que les pays pre-
sents en Normandie commemore-
ront la reconciliation entre
nations jadis ennemies. Mais, a ce
stade, dit-on a Paris, aucune ren-
contre entre M. Poutine et M. Poro-
chenko n'est a l'ordre du jour.
« Recoller les morceaux»
L'entrevue envisagee entre les
presidents francais et russe mar-
que une inflexion dans les ten-
sions entre Moscou et les pays
occidentaux. Le calendrier n'est
pas anodin. Cet entretien se
deroulera dans la foulee du G7 a
Bruxelles, les 4 et 5 juin, organise
a la place du G8 avec la Russie a
Sotchi, annule en raison de la des-
tabilisation menee par Moscou
en Ukraine.
La rencontre Hollande-Poutine
serait done le premier signe tangi-
ble d'une volonte de « recoller les
morceaux» avec la Russie, selon
un diplomate, pour ebaucher une
sortie de crise en Ukraine. Il reste
neanmoins a regler les modalites
de ce rendez-vous. L'exercice rele-
ve d'une delicate choregraphie.
Le conseiller diplomatique du
Kremlin, Iouri Ouchakov, a indi-
que, mercredi, que cette rencon-
tre prendra « la forme d'un
diner ». A Paris, on releve que le
format de cette reunion n'a pas
encore ete tranche. Seule certitu-
de : la Maison Blanche a deja indi-
que qu'elle ne prevoyait pas de
tete-a-tete entre les presidents
Obama et Poutine.
Les deux hommes se verront
cependant le vendredi 6 juin, lors
d'un dejeuner officiel au chateau
de Benouville (Calvados), en com-
pagnie de Francois Hollande et de
l'ensemble des chefs d'Etat et de
gouvernement. lis assisteront
ensuite a une ceremonie a Ouis-
treham, l'une des plages du Debar-
quement.
Au-dela de ces considerations
de protocole, la presence, la semai-
ne prochaine en France, des princi-
paux dirigeants occidentaux et de
M. Poutine sera la premiere oppor-
tunity d'ebaucher un dialogue
diplomatique de haut niveau sur
la crise ukrainienne en permet-
tant a chacun de preserver la face.
Nul besoin, au prealable, de fai-
re des concessions puisque l'Ukrai-
ne n'est pas, officiellement, a l'or-
dre du jour de ces manifestations
du souvenir. ■
Yves-Michel Riols
Des conseillers pour les rebelles syriens ?
Washington
Correspondante
Barack Obama a-t-il decide d'en-
voyer des conseillers militaires
pour entrainer l'opposition syrien-
ne ? Dans son intervention a l'aca-
demie militaire de West Point, mer-
credi 28 mai, le president ameri-
cain a reaffirme qu'il n'y avait « pas
desolation militaire » au conflit
syrien. Mais il a aussi annonce son
intention de « travailler avec le
Congres pour augmenterle soutien
americain a ceux qui, dans l'opposi-
tion syrienne, off rent la meilleure
alternative aux terroristes et a un
dictateur brutal ».
Ce soutien accru ira-t-il jusqu'a
l'entrainement par le Pentagone
de forces de l'opposition, comme
l'affirmaient avant le discours le
Wall Street Journal et le Washing-
ton Times ? La CIA a deja un « pro-
gramme clandestin » d'entraine-
ment sur le territoire jordanien,
selon une audition au Senat du
secretaire a la defense, Chuck
Hagel, en septembre 2013. Le
debat actuel, au sein de l'adminis-
tration Obama, porte sur l'exten-
sion de ce programme au Pentago-
ne, afin de lui donner une plus
grande ampleur.
«Tres clair»
M. Obama a-t-il tranche ? Apres
le discours presidentiel, un haut
responsable de l'administration
n'a pas dementi que l'option soit
sur la table, mais il n'a pas confir-
me que la decision avait ete prise.
« La Maison Blanche va entamer
des discussions avec le Congres »
sur « le role potentiel de Yar-
mee dans cet effort », s'est-il bor-
L'opposition au regime Assad se f elicite
La Coalition nationale syrienne
(CNS), qui regroupe les principa-
ls formations anti-Assad, a
salue le discours du president
americain. Le renforcement de
I'aide a l'opposition promis par
Barack Obama «met en lumiere
le partenariat entre les Etats-
Unis et le peup/e syrien pour met-
tre fin au desastre humanitaire et
placer la Syrie sur la voie d'une
transition democratique authenti-
que», a declare Najib Ghadbian,
le representant de la CNS a Wash-
ington. II s'est felicite du fait que
M. Obama reconnaisse que le
conflit syrien avait un impact sur
les interets americains. «La
menace extremiste s'accrott en
Syrie dans la mesure ou le regime
Assad constitue un aimant a ter-
roristes. Ily a une convergence
d'interets entre les Etats-Unis et
la future Syrie, pour soutenir Ins-
piration du peuple a la liberte et
la lutte de I'Armee syrienne libre
contre Al-Qaida et les terroristes
soutenus par llran. »
ne a indiquer lors d'une conferen-
ce de presse telephonique.
Le haut fonctionnaire a ren-
voye a une mesure prise le 23 mai
par la commission des forces
armees du Senat (a majorite demo-
crate). Dans la loi de programma-
tion budgetaire du Pentagone, cel-
le-ci a inclus un amendement
autorisant le secretaire a la defen-
se a «fournirequipement, entraine-
mentjournitures et services pour
aider des membres choisis de l'op-
position syrienne ». Le texte a ete
approuve par 25 voix contre 1.
Comme en septembre 2013,
lorsqu'il s'etait agi de repondre a
l'attaque chimique du 21 aout
dans la banlieue de Damas,
M. Obama souhaite passer par le
Congres. Il estime qu'une decision
aussi lourde de consequences
necessite « des automations et res-
sources » specifiques, a indique
son conseiller. La Chambre des
representants, traversee de cou-
rants isolationnistes, n'est pas aus-
si enthousiaste que le Senat sur
un quelconque role americain
dans la guerre civile en Syrie.
Barack Obama approuve-t-il lui-
meme cet amendement ? Presse
de questions, le haut responsable
a fini par assener que tout etait
« tres clair». En tout etat de cause,
a-t-il assure, il « n'est pas question
d'activites a Yinterieur de la
Syrie ». La, pour le coup, la reponse
n'etait pas floue. ■
CLs
Xelllonde
Vendredi 30 mai 2014
INTERNATIONAL
3
Les Syriens du Liban
se pressent pour voter
a l'election presidentielle
L'ambassade de Syrie a Beyrouth est accusee
d avoir exerce des pressions sur les electeurs
Beyrouth
Correspondance
Incapable de se choisir un presi-
dent, le Liban est sans chef de
l'Etat depuis le 25 mai. Cette
vacance du pouvoir n'a pas empe-
che Beyrouth d'heberger un autre
scrutin, inedit, mercredi 28 mai:
des milliers de Syriens ont conver-
ge vers l'ambassade de Syrie au
Liban pour voter en avance a la pre-
sidentielle du 3juin. lis ont du
jouer des coudes pour atteindre la
representation diplomatique, au
milieu d'interminables bouchons
et d'un immense flot humain.
L'election en Syrie, dont Tissue
est sans suspense puisque Bachar
Al-Assad est assure de l'emporter,
s'annonce surrealiste: en pleine
guerre, elle ne pourra se tenir que
dans les zones controlees par le
gouvernement, soit sur moins de
50 % du territoire. Le vote anticipe,
prevu dans une quarantaine de
pays ou vivent des Syriens, a ete
interdit dans la plupart des monar-
chies arabes du Golfe, qui soutien-
nent l'opposition syrienne.
Au Liban, divise face au conflit
syrien, le vote organise mercredi a
donne lieu a un deferlement, des
l'aube, de partisans du president
Assad vers l'ambassade, situee sur
les hauteurs de Beyrouth. Photo-
graphic du rai's ou drapeau syrien
ou du Hezbollah a la main, ils se
sont presses sous le regard de l'ar-
mee libanaise deployee en force.
Un micro-trottoir diffuse la
veille du scrutin par une emission
satirique locale avait deja donne le
ton: aucun des Syriens inter-
viewed a Beyrouth n'etait capable
de reconnaitre les deux concur-
rents de Bachar Al-Assad, dont on
leur montrait le portrait. Faire-
valoir du president syrien, Maher
Al-Haj jar et Hassan Al-Nouri recol-
teront sans doute peu de voix au
Liban, malgre la prolongation du
vote jeudi jusqu'a minuit, decidee
par l'ambassadeur Ali Abdelkarim
Ali afin de faire face a 1' affluence
des electeurs.
Parmi eux, les ouvriers tra-
vaillant au Liban semblent avoir
ete plus nombreux, mercredi, que
les refugies - dont le nombre
depasse le million - a participer a
un scrutin confus, dans des
bureaux p rives d'isoloirs. De nom-
breux votants ont temoigne du
sentiment que seul Bachar
Al-Assad pouvait, selon eux, met-
tre fin au chaos. Mais la peur d'es-
suyer des represailles, ou de se
voir interdit de retourner en Syrie
en cas d'abstention, parait aussi
avoir largement participe a la
mobilisation.
Des medias libanais opposes au
regime syrien ont assure que le
Hezbollah avait organise des
ramassages parmi les Syriens.
Selon plusieurs temoignages, tra-
vailleurs et refugies ont en tout cas
ete l'objet de pressions variees en
amont du vote: celles du parti
Baas et de l'ambassade syrienne,
en tournee pour recruter les elec-
teurs, mais aussi, a l'inverse, de
groupes favorables a l'opposition
syrienne, comme la Jamaa Isla-
miya (la branche libanaise des Fre-
res musulmans), qui a condition-
ne son aide aux refugies a leur abs-
tention.
Mercredi soir, Fambassadeur
syrien a Beyrouth jubilait. M.Ali
considere que « ces elections sont
une reponse a tons ceux qui ont
parie sur la chute de la Syrie ».
«Cela demontre que le peuple
syrien est attache a sa terre, a sa
patrie et a sa souverainete. »
Meme parmi les plus fervents
partisans de Bachar Al-Assad au
De nombreux votants
ont temoigne
du sentiment que
seul Bachar Al-Assad
pouvait, selon eux,
mettre fin au chaos
Liban, aucun ne se fait d'illusion
sur le fait que ce scrutin est joue
d'avance. Quant au nombre gran-
dissant de «ni-ni», ces Syriens
degoutes par la destruction de leur
pays et qui rejettent le regime com-
me Fopposition, tous affirment
que la reelection de Bachar
Al-Assad n'arretera pas les com-
bats et ne lui redonnera pas une
legitimite perdue.
Les propos de Fambassadeur
syrien au Liban etaient plutot des-
tines aux capitales occidentales et
a Fopposition, qui ont d'ores et
deja denonce la « farce » electorate
du 3 juin. Mais aussi, a la coalition
libanaise antisyrienne, qui a plu-
sieurs fois reclame son expulsion.
Exasperee par le spectacle aux
abords de la chancellerie, cette
alliance dite du « 14 mars » a susci-
te un tolle dans le camp rival, en
demandant a Beyrouth d'expulser
les « Syriens loyalistes» qui «ne
sont pas menaces dans leur securi-
ty [en Syrie] ». ■
Laure Stephan
En Egypte, le marechal Sissi elu
sans surprise ni reelle concurrence
Les autorites ont prolonge le scrutin de vingt-quatre heures pour augmenter le taux de participation
Le Caire
Correspondance
A peine une heure apres la fer-
meture des bureaux de
vote, quelques centaines de
pro-Sissi se rassemblaient place
Tahrir, mercredi 28 mai, dans la
fureur des klaxons et des feux d'ar-
tifices. Les plus fervents partisans
du marechal n'ont meme pas atten-
du la fin de la soiree electorale tant
sa victoire etait assuree d'avance.
Sans surprise, Abdel Fattah
Al-Sissi a fait un score qui tient
davantage du plebiscite que du
scrutin pluraliste. Selon les estima-
tions, le candidat de Farmee a
triomphe, remportant plus 23 mil-
lions de voix, 96 % des suffrages.
Le regime redoutait un taux de
participation tres faible. D'apres la
commission electorale, il avoisine
les 47% avec 25 millions de
votants. Lors de la presidentielle
de 2012, remportee par Mohamed
Morsi, 46,5% des electeurs
s'etaient deplaces au premier tour,
52 % avaient participe au second.
Abdel Fattah Al-Sissi, presente
comme le «sauveur de la nation »
face au danger des Freres musul-
mans, echappe done au desaveu
d'une abstention de masse.
Ce risque a ete le seul element
de suspense d'un scrutin joue
d'avance. Au terme des deux jours
reglementaires, les 26 et 27 mai, la
commission electorale a decide
dans la precipitation de prolonger
la duree de l'election d'un jour.
Democracy International s'est
inquiete de cette decision prise in
extremis. La mission americaine,
mandatee pour observer le scru-
tin, met en doute Findependance
de la commission et Fintegrite du
gouvernement par rapport au pro-
cessus electoral. D'apres des sour-
ces judiciaires, Fexecutif a fait pres-
sion face a un taux de participa-
tion extremement faible, qui
menacait d'etre plus bas que celui
enregistre en 2012.
Meme le premier ministre est
monte au creneau, decretant le
second jour de vote chome pour
les employes gouvernementaux.
Le chef du gouvernement, s'ap-
puyant sur la loi electorale, a mena-
ce d'une amende de soolivres
egyptiennes (50 euros) tous ceux
qui ne rempliraient leur devoir de
citoyen.
Diffusant en boucle des images
de bureaux vides, les medias,
acquis au candidat Sissi, ont frene-
tiquement appele a la mobilisa-
tion generate. Cherchant le coupa-
ble, ils ont tour a tour incrimine la
vague de chaleur, qui aurait empe-
Des partisans cT Abdel Fattah Al-Sissi sur la place Tahrir, au Caire, mercredi 28 mai. amr nabil/ap
che les citoyens de se rendre aux
urnes ; puis la paresse et Firrespon-
sabilite des electeurs ; enfin, ils ont
denonce Fincompetence de la com-
mission electorale.
Apres observation, on constate
que les jeunes sont les grands
absents du scrutin, bien que les
18-40 ans representent plus de
60% du corps electoral, selon le
Conseil national egyptien des
droits de l'homme.
Les femmes, en revanche, ont
fait le deplacement. «Elles etaient
en premiere ligne, souvent avec le
meme profil, en train d'agiter des
drapeaux et de chanter, remarque
Hicham Mourad, professeur de
sciences politiques. Le regime a
beaucoup joue sur le charisme du
marechal pour mobiliser les fem-
mes, qui sont souvent les premieres
victimes du manque d 'education,
du chomage... et done plusfacile-
ment mohilisahles. »
Geographiquement, le taux de
participation est nettement infe-
rieur dans le sud du pays, ou il tour-
ne autour de 35 %. «Louxor, Sohag,
Minya sont des regions tradition-
nellement tenues par les Freres
musulmans et la Gamaa Al-Isla-
miya», precise un juge egyptien,
charge d'observer le scrutin.
Cette laborieuse mobilisation
est l'effet logique d'un scrutin
gagne d'avance, opposant un can-
didat ecrasant a son rival inconsis-
tant. «La situation n'a rien a voir
avec 2012, oil on I 'avait douzecandi-
dats. Aujourd'hui, tout est en
faveurde Sissi : I'insecurite, le terro-
risme, la lutte contre les Freres »,
explique Hicham Mourad.
C'est sans compter Fattitude
des medias, les plus fideles allies
du marechal, qui, par leur zele
excessif, ont fini par lui causer du
tort. «Ils ont intensement pousse
Hamdine Sabahi,
quivoulait
rassembler
l'opposition,
n'a meme pas su
convaincre
son propre camp
au vote pour Sissi. Mais les gens ne
sont pas dupes, poursuit le cher-
cheur. La plupart des citoyens nese
preoccupent ni de democratic ni
des Freres. Ils voient que leur situa-
tion quotidienne s'est degradee
depuis trois ans. Ils sont resignes, ils
savent que leur vote ne changera
rien. De ce point de vue, on retrouve
I'etat d' esprit qui existait sous Hos-
niMoubarak.»
Reste que le vrai perdant de cet-
te election n'est autre que Hamdi-
ne Sabahi. L'unique rival du mare-
chal arrive troisieme avec quelque
800000 suffrages, derriere le
vote nul. Figure de l'opposition de
gauche, il etait arrive en troisieme
position a la presidentielle, obte-
nant pres de 5 millions de voix.
Celui qui voulait rassembler l'op-
position n'a meme pas su convain-
cre son propre camp. Meme dans
son village natal, Baltim, dans le
Delta, il a ete devance par Al-Sissi.
« La menace d 'amende a tres claire-
ment favorise le vote nul. Mais
concernant Sabahi, je crois que sa
carriere politique est finie»,
conf iait hier soir un juge, sous cou-
vert d'anonymat.
L'election n'a pas ete exempte
d'irregularites. La campagne de
Sabahi a denonce de mauvais trai-
tement a Fencontre de ses repre-
sentants. Quelques-uns d'entre
eux ont ete arretes et battus par la
police. Des photos de corps mar-
ques de coups circulent sur les
reseaux sociaux.
Enfin, selon le syndicat des jour-
nalistes, certains reporters, des
photographes du journal d'opposi-
tion Al-Badil notamment, se sont
vu interdire Faeces aux bureaux
de vote. Les observateurs de
l'Union europeenne doivent ren-
dre un premier rapport ce jeudi.
Les resultats officiels devraient
etre connus dimanche ou lundi
prochain.a
Marion Guenard
Le sort du president colombien, Juan Manuel Santos, est lie a la paix avec la guerilla
Le candidat de droite, Oscar Ivan Zuluaga, oppose aux negociations avec les FARC, est arrive en tete au premier tour de 1 election presidentielle
Analyse
Bogota
Correspondante
Le president colombien, Juan
Manuel Santos, promet de
signer la paix avec la guerilla.
Arrive en tete du premier tour de
l'election presidentielle, diman-
che 25 mai, Oscar Ivan Zuluaga
menace, lui, de rompre les negocia-
tions en cours avec les Forces
armees revolutionnaires de
Colombie (FARC, extreme gauche).
«A croire que mon pays prefere la
guerre... », soupireJuanJacobo,etu-
diant en histoire, en ecoutant,
dimanche soir, les resultats.
Avec 29,25 % des voix M. Zulua-
ga a devance M.Santos (25,69%).
Pour le second tour, le report des
voix des trois petits candidats qui
totalisent plus du tiers des suffra-
ges sera decisif. Lundi matin,
M. Zuluaga reiterait qu'en cas de
victoire il suspendrait immediate-
ment les negociations engagees
avec les FARC a La Havane.
«Parce que le bilan de son pre-
mier mandat n'est pas brillant en
matiere d'education, de sante ou
de construction d'infrastructures,
Santos a choisi de polariserle debat
politique sur le theme de la paixou
de la guerre. Cefaisant, il s'est place
surle terrain de predilection de I'an-
cien president Alvaro Uribe», ful-
mine Claudia Lopez, elue senatrice
en mars pour TAlliance verte.
Depuis quatorze ans, Alvaro Uri-
be domine les urnes. En 2002 et
2006, il est elu a la presidence des
le premier tour. En 2010, il sou-
tient Juan Manuel Santos, qui Tem-
porte sur la promesse de poursui-
vre Teffort de guerre engage huit
ans plus tot par M. Uribe. Une fois
au pouvoir, M. Santos tend la main
aux FARC. Trahi, M. Uribe ne cesse-
ra d'attaquer le processus de paix.
C'est lui qui a lance la candidature
de M. Zuluaga et qui la soutient a
bout de bras et a coups de tweets.
« La paix n 'est pas unsujet renta-
ble dans les urnes, explique
M me Lopez. D'autant que Santos n'a
pas joue la carte de Vespoir, mais
celle de la peur. Entre la peur d'Uri-
be et la peur de la guerilla, le pays
n'a pas hesite.»
Les Colombiens ont la haine des
FARC. « Huit ans de gouvernement
uribiste ont contribue a attiser cet-
te rage», souligne le chercheur
Daniel Pecaut, grand connaisseur
de la Colombie. Et de faire remar-
quer que les groupes paramilitai-
res d'extreme droite et les atroci-
tes qu'ils ont commises dans les
annees 1990 n'ont pas suscite une
telle reaction de l'opinion publi-
que.
L'importance des negociations
de paix dans le debat electoral est
d'autant plus paradoxale que le
sujet n'interesse guere les Colom-
biens, a en croire les sondages.
Selon l'institut Gallup, la paix arri-
ve au septieme rang de leurs preoc-
cupations, derriere le chomage, la
sante, la delinquance, l'education,
la corruption et la pauvrete.
«Le conflit arme, qui se joue
desormais dans les regions periphe-
riques, loin des villes, ne derange
plus grand monde, explique
M. Pecaut. Mais une partie des eli-
tes est en train de se rendre compte
« La paix n'est pas
un sujet rentable
dans les urnes »
Claudia Lopez
senatrice de I'Alliance verte
qu'il leur est utile. Le conflit a etouf-
fe pendant plus de cinquante ans
les mouvements sociaux. Toute
mobilisation populaire etait accu-
see d'etre infiltree ou manipulee
par la guerilla. Un accord de paix
pourrait bien signifier la fin de la
tranquillite sociale qu'a connue la
Colombie. La grandegreve paysan-
ne de I' ete 2013 et celle du mois
d'avril ont avive cette peur. »
Dans les regions telles que le
Boyaca ou le Santander, ou le mou-
vement agraire a ete le plus fort,
M. Zuluaga est arrive en tete. Il est
egalement arrive premier dans les
grandes villes et dans les bastions
historiques des FARC, aujourd'hui
largement pacifies. Le president
Santos, lui, l'a emporte dans les
departements ou le conflit perdu-
re : Putumayo, Cauca, Narino, dans
le sud et le sud-ouest du pays, ainsi
que sur la cote carai'be.
«Il y a deux processus de paix
paralleles, note le chercheur Ariel
Avila. Celui de La Havane, oil une
vraie confiance s'est etablie entre
les negociateurs des FARC et ceux
du gouvernement. Trois des cinq
points de I' agenda ont deja fait l'ob-
jet d'un accord. La treve, quand elle
a ete decretee par la guerilla, a ete
respectee.Mais, en Colombie, I'ima-
ge des negociations est tres negati-
ve. Alvaro Uribe a reussi a convain-
cre ses compatriotes que le gouver-
nement livrait le pays auxcommu-
nistes, que la propriete privee etait
menacee, que les criminels de
guerre allaient faire leur entree au
Congres. » M. Uribe est un grand
communicateur.
Bogota a choisi de negocier a
La Havane, loin des micros et des
cameras, afin de soustraire le dialo-
gue aux contraintes de la mediati-
sation. Mais dix-huit mois apres le
debut des negociations, la discre-
tion est devenue un handicap.
Le president Santos n'a pas su
faire comprendre l'importance du
processus de paix a ses conci-
toyens. « Le defi est de taille dans la
mesure oil un accord de paix, a
court terme, ne changera rien au
quotidien pour I'immense majori-
ty des Colombiens. Ses bienfaits se
feront sentir sur le long terme »,
souligne Ariel Avila. M. Uribe en
profite pour tirer sur le processus
de paix a boulets rouges. Et par
Oscar Ivan Zuluaga interpose. ■
Marie Delcas
4
INTERNATIONAL & EUROPE
Xe31lon3e
Vendredi 30 mai 2014
Centrafrique : regain de violences
interconfessionnelles a Bangui
Des miliciens musulmans ont attaque une eglise, en represailles aux exactions des anti-balaka
Des parents de victimes de l'attaque contre l'eglise Notre-Dame-de-Fatima, le 28 mai, a Bangui, jerome delay/ap pour «
Bangui
Envoye special
La depouille de l'abbe Paul-
Emile Nzale repose sur une
table de carrelage froid. Ce
n'est pas la premiere fois qu'un
religieux est tue en Republique
centrafricaine (RCA) mais, a Ban-
gui, les repercussions de cette
mort, et d'une dizaine d'autres
depuis dimanche, laissent crain-
dre une nouvelle vague de violen-
ces dans la capitale.
Mercredi 28 mai, aux environs
de 15 heures, des assaillants venus
du quartier PK5 ont lance une atta-
que sur l'eglise Notre-Dame-de-
Fatima, dans le quartier du meme
nom. On n'ose imaginer les cris de
terreur lorsque «les groupes de
musulmans de la rue Poussiere»
ont penetre dans la concession ou
s'abritent, chaque nuit, des centai-
nes de families. « On a toutes enten-
du le bruit des armes pendant plus
d'une heme. Les gens etaient refu-
gies derriere l'eglise et dans les
bureaux... Heureusement que les
anti-balaka [miliciens Chretiens]
sont venus pour nous proteger.
Sinon, ily aurait eu beaucoup plus
de morts », raconte le pere Gabriele
Perobelli. Le missionnaire italien
dit avoir compte onze morts apres
le raid. Au moins trois autres per-
sonnes sont mortes dans des hopi-
taux. Six blesses, dont certains gra-
vement selon le Comite internatio-
nal de la Croix-Rouge, etaient soi-
gnes mercredi soir a l'hopital com-
Attaques
et represailles
se succedent autour
duPK5, ousont
confines les derniers
musulmans de Bangui
munautaire de Bangui. Un nombre
indetermine d'autres victimes
auraient ete transporters dans un
autre centre de sante de la ville.
« Regardezcelui-la, une balle per-
due afrottesa tete. Une balle recue,
ilfaudrait plutdtdire! », s'exclame
Geordanne Sokambi en designant
un adolescent aussi hebete que
chanceux. Elle et son frere Michel
viennent de deposer leur voisin
touche d'une balle a la jambe gau-
che. Sur les bancs de l'hopital com-
munautaire, ils racontent que « les
musulmans sont venus nombreux.
En vehicule pour certains, d'autres
a pied. Ils ont jetedes grenades, tire
a I'interieur de l'eglise. »
Les rumeurs les plus inquietan-
tes circulaient mercredi soir. Plu-
sieurs survivants assurent qu'une
quarantaine de personnes ont ete
enlevees par les assaillants. Ali, un
ancien boulanger du PK5 reconver-
ti en milicien, confirme a sa manie-
re. « On a attrape des gens qui ne
parlaient ni sango [la langue
nationale] ni francais. Ce doit etre
des mercenaires congolais car ils ne
parlent que le lingala », pretend-il.
Le rapt contre rancon, dans le
meilleur des cas, est devenu Tune
des armes de la guerilla qui se pour-
suit dans certains quartiers de la
capitale.
Cet homme, qui dit avoir partici-
pe au raid, estime qu'il ne s'agissait
que d'une riposte apres que des
miliciens anti-balaka ont attaque,
plus tot dans l'apres-midi, son
quartier. « Hier [mardi], ils nous ont
encore attaques jusqu'd minuit, et
aujourd'hui, ils sont venus en trois
colonnes. La tuerie de Notre-Dame-
de-Fatima, ca ne nous concerne
pas, mais les anti-balaka nous atta-
quent depuis la-bas», ajoute Ous-
mane Aboubacar, qui se presente
comme le porte-parole des musul-
mans centrafricains.
Ces violences interviennent
alors que les tensions autour du
dernier bastion de la communau-
te musulmane de la capitale se
sont encore ravivees depuis
dimanche. Ce jour-la, trois jeunes
musulmans avaient ete lynches et
mutiles tandis qu'ils se rendaient
a un match de football de « la recon-
ciliation ». D'autres auraient ete
enleves par un groupe d'anti-bala-
ka. Depuis, attaques et contre-atta-
ques se succedent autour du PK5.
De bonne source, dans ce reduit ou
sont confines les derniers musul-
mans de Bangui, le mot d'ordre
qu'il fallait « passer a I'offensive » a
ete transmis.
Des barricades ont ete erigees,
jeudi matin, dans plusieurs par-
ties de la ville. ■
Cyril Bensimon
Les Chabab somaliens revendiquent l'attentat de Djibouti
L attaque, la premiere a Djibouti, visait les Occidentaux. Elle a fait trois morts, dont deux kamikazes
Pointes du doigt depuis plu-
sieurs jours par les autorites
djiboutiennes, les islamistes
somaliens chabab ont revendique,
mardi 27 mai, l'attentat-suicide
perpetre trois jours plus tot dans
un restaurant de Djibouti. «Dans
le cadre de la guerre sainte contre
la croisade menee par VOccident
contre I'islam, les forces des Cha-
bab ont mene une operation cou-
ronnee de succes samedi soir
contre la coalition croisee occiden-
tal basee a Djibouti », ecrivent-ils
dans un communique envoye a
l'Agence France-Presse.
Perpetre vers 20 heures, samedi
24 mai, l'attentat a eu lieu dans un
restaurant tres frequente par les
Occidentaux, et fait, selon les auto-
rites djiboutiennes, trois morts
(deux kamikazes et un ressortis-
sant turc), ainsi que plusieurs dizai-
nes de blesses, dont sept Francais,
quatre Allemands, trois Espagnols
et six Neerlandais, pour la plupart
participant aux operations de lut-
te contre la piraterie au large de la
Somalie, dont Djibouti est le cen-
tre nevralgique.
Si la revendication des Chabab
n'avait pas ete officiellement
authentifiee, mercredi, par les
chancelleries occidentales, l'atta-
que est une premiere dans ce petit
Etat de la Corne de l'Afrique, dirige
d'une main de fer depuis 1999 par
le president Ismail Omar Guelleh,
precieux allie des Occidentaux
dans la region.
Situee sur les bords de la mer
Rouge, face au golfe d'Aden, l'ex-
colonie francaise a une importance
geostrategique inversement pro-
portionnelle a sa taille
(21000 km 2 ). Djibouti est devenu
une gigantesque base militaire
internationale, au cceur des opera-
tions de lutte contre la piraterie et
contre le terrorisme. Les Etats-Unis
y possedent leur seule base militai-
re sur le continent africain (envi-
ron 4000 hommes), qu'ils ont
considerablement developpee ces
dernieres annees pour en faire le
point de depart des operations anti-
terroristes en Somalie et au Yemen.
La France y compte, elle, quel-
que 2 000 hommes. Japonais, Bri
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